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Les 12 heures de Bures-sur-Yvette
Sur la route des 100 bornes et des 24 h
(mis en ligne le samedi 1er juin 2002, modifié le 8 juillet 2002)
C'est une petite course, gratuite, mais qui a tout d'une grande. Les 12 heures de Bures-sur-Yvette, dans l'Essonne, est idéale pour se faire une première expérience sur une course "horaire". Je l'avais faite à l'aube de mes vingt ans, en 1992, et j'avais déjà eu l'expérience d'une ambiance et d'une organisation irréprochables. J'ai retrouvé tout ça sur cette 12e édition de l'épreuve. Avec 95 kilomètres, ma performance n'est pas fantastique, même si je finis - dans la douleur - 2e senior et 8e au scratch. Mais c'est un premier pas vers les 100 bornes. Et surtout vers les 24 heures.

Texte et photos : Philippe Giovanelli


Sur Ultrafondus
La présentation détaillée de l'épreuve et du parcours. > lire

En savoir plus
Le site des organisateurs "Jogging du dimanche matin" : jdmbures.free.fr


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Je cherche toujours un truc pour commencer mes récits de course, une anecdote, une parole, une pensée qui permettrait de démarrer fort, de faire partir le lecteur sur les chapeaux de roue, sur un résumé éclatant de ce qu'a été cette journée... A chaque fois c'est la même chose : c'est mon état d'esprit du matin qui conditionne ma journée...

Tout commence donc au petit matin, au très petit matin. Il fait encore nuit noire et un peu frais. A 4h30 en ce dimanche 26 mai 2002 de fête des mères, je viens d'arriver à Bures-sur-Yvette, dans le département de l'Essonne. Dans 30 minutes, je partirai pour ma plus longue sortie jamais réalisée. Douze heures qui me feront passer toute la journée à courir et courir encore. Le pied, quoi.

De la décontraction au départ

Cette course, je l'ai déjà courue en dilettante alors que j'étais à la fac, voilà 10 ans. Le parcours à l'époque était très pentu mais j'avais tout de même fait, dans cette folle jeunesse, environ 67 kilomètres pour 7 à 8 heures d'effort. J'étais parti et arrivé comme sur un nuage, complètement inconscient de ce que pourrait représenter pour moi ce type d'épreuve quelques années plus tard. En tout cas, le virus de l'ultra m'a sûrement pris un peu sournoisement ce jour là.

Aujourd'hui, je gare ma toute nouvelle voiture (c'est l'acquisition qui est neuve, pas la voiture...) tout prêt de la ligne de départ. La plaque immatriculée 75 me donne le droit de me mettre n'importe où puisque le parisien est de fait un emmerdeur. J'en profite mais de toute façon personne ne me fait la moindre remarque. En dehors de Paris on est de fait vachement sympa. Une légère agitation naît à quelques mètres de moi. Les frontales des organisateurs et de quelques coureurs qui arrivent déjà se baladent dans le noir et je comprends qu'il est temps d'aller m'inscrire. Je remplis ma feuille, hésitant un peu à remplir la case "palmarès" destinée à l'animateur... De toute façon, je n'ai rien à mettre à part une sortie longue de 52 km, quelques marathons, des médailles en natation, et deux ou trois traversées de la France en vélo. Tant pis pour lui, Papy Turoom devra s'en tirer sans ça.

Papy Turoom, c'est l'animateur, l'organisateur, le catalyseur. Je ne le connais que de nom, uniquement par internet et j'ai vu sa photo, un jour, dans Jogging International. Déjà les bénévoles et autres coureurs locaux présents lui parlent avec décontraction et bonne humeur. Pour un coureur comme moi qui va se flinguer les muscles pendant 12 heures, c'est important, de sentir de la décontraction. Papy Turoom et ses amis des Joggers du Dimanche Matin (JDM) organisent ces 12 heures chaque année, et chaque année, c'est gratuit. On retrouve les mêmes à l'origine du désormais célèbre Raid28.

Quelle comète, ce flambeau !

Je porte le numéro 6. J'ai mis les collants, un t-shirt à manches longues et un autre à manches courtes par dessus avec mon dossard. Le temps est frais mais il devrait s'arranger avec les premières heures du jour.

Une trentaine de lève-tôt se rassemblent derrière la ligne, et le départ est donné à 5 heures pétantes. Nous devrons tourner autour du bassin d'expansion de Bures pendant 12 heures. La boucle mesure un peu plus de 2,6 kilomètres et le chemin est en grande partie composé de sable et de graviers. Pas mal pour courir longtemps. Pas mal du tout. En tout cas, ça change du parcours bétonné d'il y a dix ans.

Les premières foulées, ce sont mes préférées. Un coureur ouvre la route avec un flambeau et déjà plusieurs groupes se forment. J'écoute les conversations, les exploits des autres : "Quand j'ai fait Cléder, je faisais jusqu'à 120 km par semaine... Le jour J, j'ai eu l'impression d'aller plus vite sur le deuxième 50 km que sur le premier, alors que finalement, je suis parti à 11,5 km/h pour finir à 10,5 km/h." Le grand barbu à short rouge, que je vais retrouver plus loin, parle ensuite de tonus musculaire... Je me force à ralentir un peu. Je n'ai pas l'expérience de ces sorties longues et si lui part à cette vitesse, c'est que moi je dois aller bien moins vite. Pendant ce temps, le flambeau avance à une vitesse de folie, une vraie comète. J'ai du mal à croire que les premiers arrivent suivre la cadence. Et pourtant, si.

Calages techniques pendant les premiers tours

A ce moment, je crois encore que chaque tour mesure 2,2 km. C'était du moins l'indication donnée par Papy Turoom lorsqu'il a annoncé sa course sur la liste Jogging. Je boucle le premier en plus de 16'30 ! Incroyable ! A peine 8 km/h... Pendant ces premiers tours, un certain nombre de questions existentielles essentielles vont assaillir mon cerveau devenu malade : Est-ce que le balisage de mes lieux d'entraînements est correct ? Est-ce que j'ai bien mesuré mes rythmes ? Quand je cours à 10 km/h, suis-je vraiment à cette vitesse ? Est-ce que le tour du bassin fait vraiment 2,2 km ? Au bout de trois tours, le premier me double une première fois. Il a donc une moyenne de 11 minutes au tour et comme il va faire environ 130 bornes, une boucle complète doit plutôt mesurer dans les 2,5 km...

Je reste fidèle à ma réputation de toujours couper les cheveux en quatre en regardant depuis le départ mon pouls. Il bat à 160 alors que ma limite haute en endurance se trouve à 158. Mais je n'ai pas l'impression d'aller si vite. De plus, si le tour fait bien 2,2 km, il m'est psychologiquement impossible de ralentir encore plus ! Je m'arrête deux minutes après le 4e tour pour me changer en me disant que c'est peut-être la chaleur naissante qui accroît mon rythme cardiaque. Court vêtu, je respire mieux mais les pulsations restent sensiblement à 158-160. Peu importe, on verra bien.

Pendant les premiers tours, je m'occupe donc l'esprit avec les calages techniques. Mon pouls doit baisser un peu, je dois demander à un bénévole combien mesure un tour, je dois me trouver une stratégie marche/course qui tienne la route, je dois gérer mes ravitaillements pour ne pas me gaver mais quand même pouvoir tenir les 12 heures sans faiblir, je dois faire un petit coucou à Papy Turoom en lui balançant un petit mot spirituel qui lui donnerait un indice sur mon identité. Pas de quoi s'ennuyer et peu à peu tout se précise.

Un groupe très soudé avec la première féminine

Au ravitaillement du 5e tour, je pose à une bénévole la question des distances. Elle me répond avec une voix claire et ne laissant aucune place au doute : "2 kilomètres 600 et je sais plus combien..." Aahhh ! Rapide calcul, je suis sur une base de 110-115 kilomètres, arrêts compris. Je peux donc continuer sur des tours chronométrés entre 16'30'' et 17'. Je décide également assez rapidement de manger et de boire un verre d'eau tous les tours pairs et de prendre juste un verre d'eau les tours impairs. Concernant la marche, là encore, je fais rapidement le choix de courir les 100 m qui séparent la ligne de départ du ravitaillement, puis de marcher à chaque tour jusqu'à ce que le chrono (remis à zéro sur la ligne) indique 2 minutes. Cela me fait environ 1'30'' de marche à chaque tour. Ayant beaucoup lu sur ce type d'épreuves, je sais que c'est moins que le 1/5e de proportion de marche habituellement préconisé - je devrais en effet plutôt marcher entre 3 et 4' - mais tant pis. Tout ce petit train-train devient vite réflexe et ne me quittera plus jusqu'à la fin (sur le principe, du moins).

Les tours défilent à bonne allure et sans soucis. La première heure, je double peu de monde et vois même les trois ou quatre premiers me prendre allègrement un premier tour. Leur manège continuera durant toute la course mais à intervalles de plus en plus longs. Eux aussi souffrent. Je cours à peu près à la même allure qu'un vétéran 2 ou 3 qui est dans une forme physique remarquable, extrêmement régulier, pas énervé. Il est à une vingtaine de mètres devant moi pendant quelques tours. Je le doublerai définitivement ensuite à la faveur d'un arrêt un peu long.

Je repère également un autre groupe qui me semble très soudé et qui le restera. C'est celui qui s'est formé autour de la 1ère féminine. Les trois ou quatre coureurs qui l'accompagnent ne semblent pas être là pour l'aider et c'est d'ailleurs assez surprenant. Ils prennent leur temps et fonctionnent comme une équipe qui veut arriver entière au bout des douze heures. Au fil de la journée, je ne les jamais vus séparés de plus de 10 mètres et de toute manière, ils s'arrêtent à chaque tour pour repartir ensemble. Ils ont bien calé leur rythme, même s'ils vont nettement ralentir au fil de la course. Leurs pauses au ravitaillement sont plus longues que les miennes et restent statiques. Pour ma part, je prends vite la bouffe, je bois mon verre d'eau et mange en marchant.

La mi-course et pas de problème particulier

Pendant assez longtemps, ils seront devant moi. Assez loin. Je les repère grâce au maillot rouge d'un de ses membres. Puis, je commence à les rejoindre aux ravitaillements, tandis qu'ils me doublent à nouveau dans le même tour. Plus loin dans la matinée, je les double sans qu'ils ne me rattrapent et enfin, à la faveur d'arrêts plus longs de leur part, je finis par leur prendre quelques tours avant la mi-course. Je reste sur le même rythme pendant ces six premières heures, avec juste l'introduction de quelques minutes d'étirements toutes les deux heures. Elles se sont imposées à moi naturellement et me font le plus grand bien.

D'autres coureurs rythment ma course, d'une certaine façon. Ainsi, j'en rattrape certains vus au départ et qui m'avaient un peu laissé sur place. Comme c'est agréable de se dire qu'on a des heures et des heures pour grignotter des places ! A aucun moment je ne m'inquiète de ma position car je sais que je tiens une moyenne raisonnable. Et mon seul objectif à ce moment là, c'est de dépasser les 100 km. Si possible...

Vers le 10e tour - 22,5 km et environ 2h20 -, j'ai le grand barbu au short rouge en point de mire. A chaque fois que je le vois repartir du ravitaillement, il a une foulée légère et bondissante. Il a l'air plutôt bien et je ne comprends pas vraiment pourquoi l'écart se réduit tellement j'ai l'impression d'être lent. Un peu après 11 heures du matin - la mi-course - je le double. J'ai fait 22 tours soit environ 58 km et je prévois de m'arrêter à la fin du 23e pour m'étirer.

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