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Le moine marathonien du mont Hiei
(mise à jour le vendredi 15 mars 2002)

Héroïsme ou folie ? Egoïsme ou rébellion envers un pouvoir en place ? Difficile pour nous d'expliquer ce qui peut pousser un moine, même bouddhiste, à effectuer une "marche des 1000 jours", également appelée "marche des 1000 marathons". L'épreuve s'étale sur 7 années pendant lesquelles Kakudo va parcourir la bagatelle de 44000 kilomètres. Un tour de globe.

Par Philippe Giovanelli


La partie la plus difficile de cette épreuve initiatique a donné lieu à un excellent documentaire. Pendant une centaine de jours, le moine parcourt quotidiennement l'équivalent de deux marathons, soit environ 85 kilomètres, chaussé de ses sandales de corde. Parfois suivi d'un ou de plusieurs fidèles, parfois seul, il enchaîne les kilomètres, les cérémonies rituelles et une période de diète végétarienne qui l'amène aux frontières de la mort. Ou de la vie, comme on veut.

Kakudo est un moine Tendaï, une secte fondée en 805 sur un modèle chinois. Elle a surtout pour but d'encourager tout un chacun à devenir un Bouddha. La marche des mille jours est un entraînement rituel auquel se soumettent les Ajari, sous groupe de l'obédience Tendaï. Durant cette période, les moines, vêtus de blanc, coiffés d'un chapeau semblable à une pirogue renversée et chaussés de sandales de paille parcourent en courant la ville de Kyoto et ses alentours escarpés. Ce périple est rythmé par un mantra sanscrit récité en silence. Au 700e jour, le moine doit respecter une retraite de neuf jours sans manger, sans boire et sans dormir. C'est l'épreuve de la "mort vivante". On ne devient Ajari, du sanscrit "Acharya" (maître spirituel) qu'après ce périple de mille jours.

Pendant cette centaine de jours, Tanno Kakudo rayonne autour de sa montagne magique. Son accoutrement, ses gestes, chacune de ses pensées sont semblables à ceux qu'aurait pu avoir l'un de ses prédécesseurs dès le XIIe siècle. Selon Jean-Yves Tayac, "le moine Kakudo se présente en sauveur de l'humanité, le marathon fait de lui un saint martyr". En cas d'échec Kakudo sait qu'il devra se donner la mort. On pourrait presque voir une sorte d'humour noir à l'entendre hésiter entre la pendaison et l'auto-éviscération.

Pourtant cet acte n'a rien de gratuit. "Ici, la rétribution participe des modifications individuelles profondes qu'une quête de soi ne saurait manquer d'apporter. (...) Le moine Kakudo explique que son marathon des 1000 jours (...) lui permet de maîtriser son physique, de le subjuguer pour pouvoir atteindre ce qu'il appelle 'les couleurs de la vie' (...) Il n'est pas un champion sportif, mais seul l'usage langagier nous en éloigne." Jean-Yves Tayac voit dans ce moine un héros, symboliquement vainqueur de la mort car il surmonte l'angoisse qu'elle représente.

Au terme de sa longue course, Kakudo est arrivé à une évidence : que la course ne s'arrêterait jamais.

Sources :
• Aacaweb : un site offrant un panorama des religions (voir la page sur les écoles bouddhistes)
• Symbolique et rituels sportifs, Jean-Yves Tayac, éditions Dervy.
• Millennium TV pour le documentaire et les photos (Documentaire "The marathon monks of mont Hiei" - Ecrit et produit par Christopher J. Hayden - Basé sur le livre de John Stevens - Durée totale : 56' 52'' - Distributeur : CS Associates / CEN)
 
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