De
J-3 à la troisième étape, Annick
LE MOIGNIC, arrive aux frontières de
la Bretagne. De Roscoff, on ne se souvient plus lorsqu'on
arrive à Guer, après 210 km d'un tracé
très casse pattes et les étapes jugées
les plus difficiles. Annick s'était dit que la Transe
Gaule commencerait après cette région mais non.
La course commence bel et bien le premier jour, avec son cortège
de bobos, de surprises et de petites joies.
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Sur Ultrafondus
La présentation détaillée de l'épreuve,
du parcours,
et des concurrents.
En savoir plus
La Transe Gaule 2002 sur Yanoo.net,
le site de la course à pied en Bretagne.
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Dimanche
25 août 2002 : Quelques jours avant le départ,
message d'Annick
"A J-3, j'ai plutôt
les intestins noués. Je me rêvais en super grande
forme, mais c'est pas tout-à-fait ça. ET CA
M'EXASPERE. Moi qui ais un sommeil qu'on m'envie, me voilà
réveillée de multiples fois, n'attendant même
pas la sonnerie du réveil pour être debout. Et
puis côté digestif (mon point sensible), c'est
pas top. Stress ? Un peu, c'est bien, mais franchement là
j'en fais trop.
"Je suis dans les derniers préparatifs, une liste
incompressible de choses à ne pas oublier, un sac béant
qui attend qu'on (enfin que je) veuille bien mettre de l'ordre,
un stock de nourriture entassé dans un bac de rangement,
une trousse à pharmacie à compléter,
etc...comme un départ en vacances, enfin presque...un
rêve en tout cas dont j'ai encore du mal à imaginer
le déroulement.
"J'ai commencé à reporter cet après-midi
sur les cartes, à l'aide du road-book, le parcours
concocté par Jean-Benoît Jaouen. Je me mets dans
la tête qu'il va falloir y aller tout doux, que je vais
passer mes journées sur les routes... Ne pas brûler
les étapes, profiter des contrées traversées,
une France à découvrir et d'abord une Bretagne...
Evidemment, la Bretagne, c'est aussi pour moi une partie de
la famille, enfin celle de mon mari, et on m'a promis qu'à
Pontivy, il y aurait de la visite. Je me demande comment ça
va se passer aussi, ce moment-là.
"Enfin, bref, je suis tournée vers la Transe Gaule,
les pensées accaparées, et pour ce qui s'est
passé avant, c'est déjà du passé.
Kilomètres
et stretching
"Pour la préparation,
j'ai essayé de faire au mieux (enfin je crois) avec
les contraintes du boulot et les autres. C'est surtout depuis
mars-avril que j'ai entamé la vraie préparation.
De toute façon, cet hiver, j'étais trop mal,
de décembre à mars, j'avais la tête qui
voulait courir mais le corps ne répondait pas. L'année
2001 avait été pour moi bien plus chargée
qu'à l'ordinaire, et à 2 reprises j'ai enchaîné
des grosses épreuves à une ou deux semaines
d'intervalle. Je l'ai peut-être un peu payé.
Phénomène associé à des soucis
pesants du moment, ça ne passait plus... Trois mois
de doute sérieux, et toujours pourtant la Transe Gaule
en arrière-plan comme objectif 2002. Et puis c'est
reparti après un repos réparateur et, heureuse
coïncidence, un encouragement d'une copine coureuse qui
vous redonne la "patate".
"Question kilométrage, j'ai tenu une moyenne hebdomadaire
de 100 à 150 km, à raison d'1 ou 2 sorties par
jour, et environ 4 sorties à jeun d'1h à 1h30.
C'était vraiment le meilleur moment des entraînements.
On est léger et quand à 6h du matin, les petits
lapins gambadent devant vous, le bonheur est total. Difficile
de faire plus, cause temps. J'ai complété cette
préparation physique par deux séances de stretching.
C''est pas du luxe : on reconnaît facilement les coureurs
dans les cours pour leur manque d'élasticité
!
Quelques craintes et un grand
désir de bonheur
"Pour les soins divers, les
pieds ont eu droit à leur régal quotidien sous
forme de crème NOK. Et depuis début juillet,
deux séances de massage par semaine, suite à
une proposition émanant d'une personne qui souhaitait
simplement me rendre service. Elle est pas belle, la vie ?
"Et puis, je n'ai pas compté
les kilos de féculents avalés pendant tout ce
temps, mais ça doit commencer à faire lourd.
"Ce que j'aime dans la préparation, c'est tout
l'investissement qu'on y met, en temps, en pensée,
en coeur. Je me rends compte aussi qu'on donne du rêve
à notre entourage, et c'est merveilleux.
"Des craintes ? Oui, bien entendu. Pas envie de douter,
pas envie d'être malade, d'avoir les boyaux qui se tordent...
De toute façon ça se gèrera au quotidien.
Envie d'avoir toujours envie d'avancer.
"Je n'ai que des envie de bonheur, même sous la
pluie, même dans le vent, en regardant tout autour,
en partageant avec les "géants" (moi, je
suis la naine comparé au parcours de tous ces transe
gaulois) qui sont venus s'inscrire à la Transe Gaule.
Une aventure humaine aussi, avec mes accompagnateurs qui vont
découvrir le monde de l'ultra. Une vraie révélation
pour tous."
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Mercredi 28
août 2002 : Etape 1 - Roscoff-Huelgoat, 57
km
La chaleur a surpris tout le monde.
Annick boucle cependant assez confortablement cette étape
de 57 km en 6h31. Les premières sensations sont
bonnes et rassurent : " Tout
le monde se met en jambes... J'avais un peu peur pour mon
estomac mais ça c'est bien passé. J'ai fait
attention à manger par petites quantités et
j'ai demandé à mes accompagnateurs d'être
prêt tous les 5 km environ. A mi étape, j'ai
mangé un peu de gâteau de riz, mais toujours
en petite quantité. A la fin, j'avais envie de soupe
et de salé. "
La course pour les autres concurrents
Vers 17 heures, 22 concurrents sur
26 étaient arrivés à Huelgoat,
après une chaude journée. La première
femme, Stephanie
EHRET, arrive en 6h15, un quart d'heure
avant Annick. Chez les hommes, c'est l'Allemand Rainer
Wilfried KOCH, benjamin de la course
(21 ans) qui l'emporte avec un temps avoisinant les
4h50.
Il se trouve à quelques minutes devant Serge
GIRARD qui, n'en déplaise aux
mauvaises langues (sic), s'est mis au même régime
que les autres avec une voiture et un suiveur. "Je
ne l'avais jamais vu courir, souligne Jean-Benoît
Jaouen, co-organisateur de la course. Il a terminé
dans un bon état de fraîcheur."
La chaleur aujourd'hui a nécessité de
nombreux va et vient pour approvisionner les coureurs
en liquide : "Un Intermarché nous
a fourni des pack d'eau à volonté."
Un gros coup de pouce, que les organisateurs n'ont évidemment
pas refusé.
Plus...
Sur UFO : Transe
Gaule | Le
parcours | Participants
Sur Yanoo.net : Résultats
de la première étape
|
Ces ravitaillements "aux petits
oignons" sont assurés par Nicole et Jean-Didier,
recrutés par petite annonce. "J'ai
rencontrée Nicole pour lui expliquer comment se passerait
cette Transe Gaule et quel serait son rôle. Elle était
très motivée. Tout s'est plutôt bien passé
aujourd'hui." Nicole et son compagnon suivront
Annick pendant toute la durée de la course.
Désormais rassurée
sur les calages logistiques, Annick l'est également
sur ses capacités physiques. Malgré tout, l'étape
de demain, la plus longue de la Transe, et celle d'après-demain,
la deuxième plus longue (!), devraient constituer des
caps psychologiques importants. "De
toute façon, il était temps que ça démarre.
En courant, on élimine le stress..."
Et pour éliminer le stress,
rien de tel que quelques papotages avec les autres concurrents,
dans le gymnase hier soir et un peu sur la route, avec une
concurrente hollandaise. "L'ambiance
est très solidaire." Rien de tel non plus
qu'une bonne organisation. Nous reviendrons prochainement
sur les prouesses que les quatre bénévoles réalisent
chaque jour.
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Jeudi 29 août
2002 : Etape 2 - Le Huelgoat-Pontivy, 78 km
Avec 78 kilomètres, l'étape
d'aujourd'hui reliant Huelgoat et Pontivy était la
plus longue de la Transe Gaule. Et la plus difficile. Annick
a moins souffert de la chaleur mais un peu plus du tracé :
"Les anciens nous ont dit
que les étapes de montagne seraient moins difficiles.
Aujourd'hui, il y avait beaucoup d'enchaînements de
montées et de descentes." Typique de l'intérieur
des terres bretonnes. "Puis
nous avons eu 18 kilomètres sur une nationale,
avec beaucoup de circulation, des camions..."
Et enfin, les petites routes. "Ça
va paraître ridicule mais on a passé les 100
km aujourd'hui. Les organisateurs l'ont marqué et Jean-Didier
mon suiveur m'a fait la bise pour fêter ça."
Soin des pieds
Ce soir, Annick avait un peu de
glace sur la cheville. Rien de bien inquiétant,
juste un peu trop de frottements au niveau du coup de
pied. "Les anciens
m'ont recommandé de couper la languette de quelques
centimètres, et même les chaussettes."
Avec le nombre de foulées, chaque frottement
devient un problème, et chaque petit problème
peut devenir une catastrophe. Une bande achève
de protéger le pied d'Annick, mais ça,
c'est un truc à elle : "J'ai
un endroit sensible au pied qui est sujet aux ampoules.
Je l'entoure d'élastoplaste et ça passe
tout seul."
Plus...
Sur UFO : Transe
Gaule | Le
parcours | Participants
Sur Yanoo.net : Résultats
complets de la deuxième étape
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De fait, la journée d'Annick
a été marquée par une foule de petites
surprises. Après le réveil en sursaut et le
départ presque "une
chaussure à la main", Nicole et Jean-Didier
se sont avérés beaucoup plus réguliers
qu'hier, sachant trouver les petits encouragements qui conviennent,
tendre la bouteille d'eau au bon moment et anticiper. Jusqu'aux
biscuits bretons, de rigueur : "Je
n'avais jamais essayé en course mais j'en avais envie,
alors..." Plus tard dans la journée, un
coureur ne faisant pas partie de la course croise Annick plusieurs
fois, puis la reconnaît finalement : "J'avais
couru avec lui en Jordanie, il a terminé avec moi."
Excellent pour le moral. D'ailleurs, la famille était
là pour l'accueillir à Pontivy, puisqu'Annick
est la régionale de l'étape "par alliance".
Malgré tout, pas question
d'oublier la course. Il ne règne pas vraiment d'esprit
de compétition entre les quatre femmes qui savent néanmoins
se jauger l'une l'autre. Jusqu'au marathon, Annick se trouve
devant Stephanie Ehret et ça l'inquiète :
"Elle est meilleure que
moi, elle a une meilleure foulée, il faut qu'elle soit
devant moi ! Je vais trop vite !" Au 45e,
tout rentre dans l'ordre et après une petite causette,
l'Américaine prend le large.
"Demain,
je pense que ça va être dur. On nous a dit que
ça allait être plat mais je crains surtout la
chaleur." Pour éviter crampes et déshydratation,
un ancien de la TG - qui ne court pas cette année -
lui avait conseillé de boire une bouteille de Vichy
Saint-Yorre par jour. Conseil qu'elle suit à la lettre
à partir de chaque mi-étape environ. Cela dit,
pas trop d'inquiétude, et la confiance reste intacte :
"C'est en gardant le moral que les choses se passent
bien."
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Vendredi 30
août 2002 : Etape 3 - Pontivy-Guer, 75 km
Le corps commence à travailler.
Sur la route qui a mené les transe-gaulois(es) vers
Guer, la dernière étape de Bretagne, il a fait...
chaud. Et les organismes commencent à souffrir après
les deux jours les plus longs. Ces premières étapes
semblent dessinées comme des tests de résistance
et de prudence. Deux coureurs, Bernard Roy et Jean-Bernard
Paillissier, ont dû abandonner, par manque de l'un ou
de l'autre. Peut-être aussi un défaut de préparation,
mais certainement une grosse déception d'arrêter
si tôt la grande aventure.
Deux abandons aujourd'hui
Les abandons sont malheureusement
inévitables dans ce genre de course. Aujourd'hui,
Bernard
ROY et Jean-Bernard
PAILLISSIER ont dû s'arrêter.
Le premier avait déjà arrêté
l'an dernier à cause d'une entorse. Il finit
là sur une fracture de fatigue, réconforté
par des organisateurs pleins d'empathie pour leurs protégés.
Quant à Jean-Bernard Paillissier, "il est
parti un peu vite dès la première étape,
estime Jean-Benoît Jaouen. Il a stoppé
aujourd'hui après trois kilomètres."
En queue de peloton, le vétéran américain
Don
WINKLEY souffre mais dispose d'un
réservoir d'astuces impressionnant, comme ce
rituel de marche à reculons sur quelques dizaines
de mètres à chaque étape. Et à
l'avant, le rythme continue d'être soutenu. Mais
on vous en dira plus sur les premiers dans quelques
jours.
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Sur UFO : Transe
Gaule | Le
parcours | Participants
Sur Yanoo.net : Les
résultats de la troisième étape
Classement après 3 jours
(source Yanoo.net)
Classt |
Nom |
Temps cumulé |
Moy (km/h) |
1 |
Rainer Koch |
18h13'44''
|
11.52
|
2 |
Bernard Grojean |
18h15'48''
|
11.50
|
3 |
Peter Backwin |
19h04'31''
|
11.01
|
4 |
Jean-Claude Le Gargasson |
19h36'31''
|
10.71
|
5 |
Serge GIrard |
19h41'10''
|
10.67
|
6 |
Philippe Favreau |
20h13'47''
|
10.38
|
7 |
Trond Sjaavik |
20h54'51''
|
10.04
|
8 |
Philippe Dieumegard |
21h09'20''
|
9.93
|
9 |
Hervé Goarant |
21h09'20''
|
9.93
|
10 |
Luc Dumont |
21h11'04''
|
9.91
|
11 |
Guus Smitt |
22h11'09''
|
9.47
|
12 |
Karlheinz Kobus |
22h52'02''
|
9.18
|
13 |
Jan Ondrus |
23h27'54''
|
8.95
|
14 |
Jacques Martin |
23h47'04''
|
8.83
|
15 |
Eric Kréa |
23h48'12''
|
8.82
|
16 |
Ria Buiten |
24h34'28''
|
8.55
|
17 |
Daniel Muller |
24h49'33''
|
8.46
|
18 |
Stephanie Ehret |
25h01'55''
|
8.39
|
19 |
Jean-Claude Reant |
25h30'31''
|
8.23
|
20 |
Annick Le Moignic |
27h44'17''
|
7.57
|
21 |
Rémy Normand |
29h03'42''
|
7.23
|
22 |
Don Winkley |
29h29'40''
|
7.12
|
23 |
Marianne Blangy |
34h23'32''
|
6.11
|
24 |
Philippe Grizard |
34h23'32''
|
5.99
|
abandon |
Jean-Bernard Paillissier |
3 étapes
|
|
abandon |
Bernard
Roy |
3 étapes
|
|
|
"Aujourd'hui,
c'était dur, car on a enchaîné une deuxième
étape longue, explique Annick. J'ai
marché un peu sur la fin alors que je m'étais
promis de ne pas le faire." La prudence reste
le maître mot de notre Normande, même si elle
accumule quelques petits soucis : mauvaise nuit, quelques
problèmes intestinaux ("Je
m'y attendais..."), et les chevilles toujours
sous la glace dès la ligne d'arrivée passée.
"Je crois que sur ce point,
ça devrait s'arranger en deux à trois jours.
Cette douleur de cheville [au niveau du coup de pied,
ndlr], c'est un peu la maladie
du Transe Gaulois."
Annick a bien préparé
sa Transe Gaule et aborde ces pépins sans être
vraiment surprise : "Je
m'attendais à souffrir, même si ce n'est jamais
agréable. Mais de toute façon, je ne suis pas
une coureuse rapide et je sais que les journées vont
être longues." Longues comme ces presque
11 heures passées sur le bitume aujourd'hui. Et ces
chevilles qui se réveillent dès le 20e kilomètre.
Heureusement, devinez quoi ? Nicole et Jean-Didier,
toujours discrets multiplient les petites idées qui
changent tout : "Aujourd'hui,
ils m'ont fait un truc super. Je leur avais suggéré
de faire un vrai repas à midi. Ils l'ont fait mais
ils m'ont surtout installé une petite table à
l'ombre, avec la polaire toute prête, une chaise. J'étais
une vraie princesse !" Un peu plus tard dans
la journée, ils iront aider Rémy Normand, un
peu en difficulté. C'est bête à dire,
mais c'est aussi cela, la Transe Gaule.
Ce soir, la priorité c'est le sommeil. Si les premiers
peuvent commencer la sieste dès le début de
l'après-midi, les autres finissent la journée
en courant. Malgré tout, Annick commence à faire
le plein d'images, comme ce silot à grain, près
de Pontivy, qu'elle connaît si bien : "Je
l'ai vu ce matin, cette cathédrale de béton
dans la brume et ça m'a fait sourire."
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